En 2014, lorsque l’anglicisme « fracking » a fait son apparition et qui désigne une fracturation hydraulique, c’est-à-dire la naissance d’une fracture dans une couche géologique peu ou pas perméable, grâce à une injection d’eau sous forte pression pour en extraire soit le gaz soit le pétrole. On comptait en Espagne pas moins d’une centaine de permis d’exploration, entre ceux accordés et ceux en attente de traitement, pour explorer le gaz et le pétrole dits « de schiste » ou « non conventionnels » dans les principaux bassins.
Le succès du « schiste » aux États-Unis, qui en a fait le premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié, dépassant le Qatar, a conduit l’Europe, qui dispose d’importantes ressources d’hydrocarbures « non conventionnels » en France et en Pologne, et dans une moindre mesure en Espagne, à envisager d’explorer ces ressources fossiles, qui n’ont jamais été bien explorées.
Dans cette optique, l’Espagne aurait peut-être bien fait de le faire au vu de la conjoncture actuelle. Alors que les États-Unis sont passés du statut d’importateur de gaz à celui de premier exportateur mondial en seulement dix ans grâce à l’augmentation vertigineuse de 70% de leur production depuis 2010, l’Espagne continue de dépendre à 99% des importations d’hydrocarbures à partir de différents pays producteurs..
En matière économique, le secteur tertiaire contribue à 67,8% du PIB de l’Espagne et emploie 76% de la population active. Suivi par le secteur du tourisme étant une des principales sources de revenus de du pays (bien que sa contribution au PIB soit passée d’un niveau pré-COVID de 12,4 % en 2019 à seulement 5,5 % en 2020 – Source : INE), car le pays est la deuxième destination touristique la plus populaire au monde (83,7 millions de touristes en 2019, avant le début de la pandémie).
En parallèle, il semble qu’il existe une ressource non exploitée équivalente au PIB national que le pays pourrait (et aurait peut-être dû) exploiter, il s’agit du gaz non-conventionnel ou plus communément appelé « Gaz de schiste ».
L’annulation de l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste ont été entraînées pour plusieurs raisons, entre autre : la pression des écologistes et des conseils locaux ainsi que la propagande lancée à l’encontre de l’exploitation du gaz de schiste dont l’impact écologique serait désastreux. Mais il faut aussi rappeler que la chute des prix du gaz à l’époque, a aussi contribué à décourager le recours à cette exploitation par fracturation en Europe.
Mais existe-t-il vraiment une réserve de gaz non conventionnel en Espagne ?
En 2014, le gouvernement de « Rajoy » a estimé qu’il existait de réelles possibilités d’exploiter d’énormes ressources en hydrocarbures non conventionnels grâce à la fracturation. De ce fait, il a établi un plan d’incitations fiscales et non fiscales afin que les communautés autonomes, les conseils locaux et les propriétaires fonciers bénéficient d’une partie du nouvel impôt, qui serait d’environ 7%, sur la valeur de la production de pétrole et de gaz. L’idée était de vaincre les réticences des régions et des conseils locaux, qui craignaient la survenance d’impacts environnementaux catastrophiques, mais qui avaient besoin d’énormes ressources après la grave récession du pays.
Cette incitation prévoyait de taxer l’exploration et le cas échéant, l’exploitation des hydrocarbures sur la valeur de la production extraite. Si elle était réalisée en mer, la communauté autonome la plus proche du gisement en bénéficierait.
En outre, la redevance d’occupation des surfaces déjà payée par les entreprises disposant d’autorisations d’exploitation a été augmentée de 1% de la valeur de la production annuelle pour les propriétaires du sous-sol des terres exploitées. Le gouvernement avait en sa faveur le postulat selon lequel la réglementation du secteur de l’énergie, et du sous-secteur du gaz, est une compétence exclusive de l’État. L’industrie avait sur la table des rapports qui garantissaient que, dans un scénario intermédiaire, l’Espagne disposerait, dans le cas du gaz naturel, d’un niveau de ressources d’environ 70x fois sa demande annuelle.
En 2040, année de production estimée la plus élevée, si l’exploitation était autorisée, l’impact sur le PIB des ressources propres provenant des hydrocarbures serait équivalent à 44,4 milliards d’euros, supérieur à celui d’autres activités comme les transports ou le secteur primaire.
Plusieurs rapports ont soutenu la thèse du gouvernement. Une étude réalisée par « Deloitte » pour le « lobby » des sociétés d’exploration et d’exploitation du gaz de schiste a estimé un scénario de base de 2.000 millions de barils équivalent pétrole et de 2.500 milliards de mètres cubes de gaz naturel. Ces chiffres équivalaient, en 2014, à 70 ans de consommation de gaz naturel, ainsi qu’à des ressources pétrolières suffisantes pour couvrir 20% des besoins pendant 20 ans.
Le « lobby » des entreprises pétrolières s’est frotté les mains avec des chiffres qu’il a qualifiés de « spectaculaires » et a calculé que tout le gaz que l’Espagne recèle selon une probabilité d’extraction de 50% vaut 700 000 millions d’euros, alors que le pétrole vaut 150 000 millions, ce qui signifie que l’Espagne possède « pratiquement un chiffre équivalent au PIB » dans son sous-sol. Au prix d’aujourd’hui, cette richesse serait encore plus importante, et cela aurait pu éviter au pays d’affronter une crise énergétique, mais aussi d’engranger des bénéfices importants.
Pendant plus de 20 ans, l’Espagne aurait eu un solde net d’exportation de gaz, et réduit de 20% ses importations nationales de pétrole brut. L’impact du développement de l’activité en termes d’emploi se traduirait, pour le scénario moyen, par une génération d’emplois directs et indirects qui dépasserait 260 000 personnes l’année du plus fort impact. Dans le scénario haut, ce chiffre atteindrait 755 000 emplois liés à l’exploitation de ces ressources fossiles.
Un scénario gâché dans les pays de l’UE où l’on a réalisé le moins d’enquêtes et qui, selon «l’Association espagnole des ingénieurs des mines », disposerait de 45 ans de réserves de gaz naturel.
Il existerait cinq bassins potentiels avec des risques maîtrisés :
L’Espagne est un pays semi-exploré en termes d’hydrocarbures. Les principales zones prospectives sont les Pays Basque et Cantabrie, le sud des Pyrénées, la vallée de l’Ebre ou du Guadalquivir. Une activité minière a eu lieu dans toutes ces régions, ce qui améliore leur état de connaissance.
En ce qui concerne les risques sismiques, « l’Association espagnole des ingénieurs des mines » a indiqué que les éventuelles secousses provoquées par la fracturation étaient non seulement insignifiantes mais aussi « impossibles à apprécier, sauf par des géophones situés à proximité » immédiate des forages au moment de l’opération de fracturation.
Il existe bien évidemment d’autres zones dont les caractéristiques géologiques et structurales, peuvent induire des tremblements de terre de faible intensité, mais ceux-ci seraient similaires aux 1 000 tremblements de terre par jour qui se produisent dans le monde sans conséquences. En fait, l’énergie libérée lors du « fracking » est bien inférieure à celle libérée par l’effondrement d’un puits ouvert d’une mine classique.
Malgré la gravité de la crise énergétique à laquelle l’Europe est en train de faire face, et qui correspond à la première priorité des Etats-membres, seules quelques informations non confirmées font état d’un intérêt de plus en plus important envers ce type de ressource énergétique, notamment en Grande-Bretagne. Pour le moment tous sont préoccupés par l’importation de gaz naturel en provenance d’autres pays producteurs, et plus particulièrement le GNL des USA, qui n’est rien d’autre que du gaz de schiste.
Important : Les estimations des volumes de gaz de schistes techniquement récupérable et commercialisable en Espagne sont approximatives et n’ont actuellement fait l’objet d’aucune étude géologique ou technique approfondie, il s’agit de scénarios probables avancés par plusieurs études incomplètes, mais aussi avancés par une partie du gouvernement espagnol.
Source : https://www.energymagazinedz.com/?p=1884