Auteur : Dr. MERAHI Reda, Docteur et chercheur en énergie
La transition énergétique est un sujet d’actualité et un débat animé entre divers acteurs, politiciens, experts et chercheurs. En Algérie, ce sujet suscite également un grand intérêt de la part des autorités, comme en témoignent plusieurs projets tels que le projet de 2000 MW PV de Sonelgaz-EnR et le projet de 1000 MW de la Société SHEMS. Beaucoup de gens pensent que la transition énergétique consiste uniquement à passer des ressources conventionnelles aux énergies vertes et renouvelables. Cependant, la transition énergétique offre aussi d’autres pistes et plusieurs solutions envisageables pour accélérer cette transition et l’appliquer à grande échelle.
Dans cet article, nous allons aborder et discuter de la conservation d’énergie et d’électricité comme piste vers la transition énergétique, en nous concentrant particulièrement sur la rationalisation des ressources en eau, qui ont été impactées ces dernières années par les changements climatiques.
- Avant-propos
L’électricité est un produit essentiel issu de diverses sources, y compris des ressources non renouvelables telles que le gaz, le pétrole, ou le charbon, ainsi que des sources renouvelables comme l’énergie solaire et éolienne. Néanmoins. Sa production implique souvent l’épuisement des ressources naturelles. Pour préserver ces dernières et atténuer l’impact environnemental, il est crucial de réduire notre consommation d’électricité.
À cet effet, nous devons élaborer un plan à l’échelle nationale pour conserver les ressources énergétiques directement ou indirectement liées à l’électricité. Cette démarche doit être appliquée à grande échelle pour obtenir les résultats souhaités et doit aussi être enseignée dès le plus jeune âge afin de familiariser nos enfants à la conservation de l’énergie. En effet, malgré le gaspillage de l’énergie qui est un comportement négatif, plusieurs catégories de la société adoptent ce mode de consommation malgré les campagnes de sensibilisation. Ces dernières ne suffisent pas et nous devons penser à d’autres options et méthodes visant à réduire sinon éliminer le gaspillage sous toutes ses formes et adopter la rationalisation comme mode de consommation énergétique.
- Le gaspillage des ressources en eau
Le secteur des ressources en eau est un secteur stratégique qui nécessite également des infrastructures importantes pour assurer la disponibilité de l’eau à travers la réalisation des installations nécessaires telles que les stations de pompage, les barrages, etc. En Algérie, une stratégie a été mise en place pour développer ce secteur suite aux changements climatiques qui touchent le pays ces dernières années. Cette stratégie est concrétisée par la réalisation de différentes stations de dessalement le long des villes côtières. Ces installations permettent au pays d’assurer une bonne distribution en eau et de garantir un avenir prometteur pour le développement du pays.
Le gaspillage d’eau est une forme de gaspillage indirect de l’énergie électrique, car toutes les installations et les équipements de pompage et de distribution fonctionnent à l’électricité. En outre, si l’on prend l’exemple du grand barrage de Beni Haroun qui est équipé d’une station de pompage d’une puissance de 180 MW, cette dernière puissance est l’équivalent d’une centrale électrique, ce qui montre la grande quantité d’énergie nécessaire pour alimenter six wilayas en eau potable.
Malheureusement, beaucoup d’utilisateurs surconsomment et gaspillent de l’eau de manière excessive et injustifiée. Il existe trois types de gaspillage des ressources en eau :
- Surconsommation d’eau : Ce type de gaspillage est très répandu dans nos foyers, commis par différentes catégories de la société, adultes et enfants. La surconsommation prend plusieurs formes, comme laisser les robinets ouverts sans utilisation, mauvaise étude et réalisation des installations sanitaires, utilisation d’équipements contrefaits, etc.
- Négligence des fuites d’eau : Ce type de gaspillage est souvent dû à la société de distribution d’eau autant qu’aux consommateurs. Les consommateurs doivent réparer leurs installations internes pour éviter les fuites et signaler celles situées à l’extérieur de leurs installations pour que les autorités concernées puissent intervenir à temps.
- Agression du réseau de distribution : En plus de la fraude de l’eau commise par certains consommateurs, d’autres commettent des actes graves en agressant les réseaux de distribution d’eau. Ces agressions sont responsables de plusieurs fuites d’eau sur les conduites de distribution.
- Le système proposé
Dans cet article, nous proposons un système permettant d’économiser les ressources en eau au niveau de nos immeubles afin de conserver et en quelque sorte réutiliser l’eau du robinet. Ce système est déjà en phase d’expérimentation en France et dans d’autres pays. Il consiste à séparer le circuit des rejets sanitaires en deux circuits : un circuit moins usé provenant des rejets des cuisines et des douches, et un circuit plus usé provenant des toilettes. Le premier circuit récupère les rejets d’eau moins usée (des cuisines et des douches), les filtre et les réutilise pour l’alimentation des chasses d’eau. Le principe de ce système est illustré sur la figure (01).
NB : Il faut noter que l’alimentation en eau des douchettes de toilette se fait par l’eau du robinet.
Figure (01) : Circuit de principe de réutilisation des eaux sanitaires
L’utilisation de l’eau de robinet directement dans les chasses d’eau est un véritable gaspillage, car ce circuit ne nécessite pas une eau de qualité pour nettoyer les sanitaires. Le système proposé permet de réduire nos consommations en eau et de conserver nos réserves en eau, qu’il s’agisse des barrages, des nappes d’eau souterraine, ou encore du dessalement d’eau de mer.
D’après la figure (01), l’emplacement des filtres permet de nettoyer l’eau de toutes impuretés ou autres saletés, et de la récupérer dans des réservoirs conçus de manière à séparer les eaux usées lourdes et à les renvoyer vers le circuit plus usé. L’eau moins usée est envoyée vers les installations des chasses d’eau à travers des pompes. Si ce système est adopté en Algérie, des mises à jour peuvent être appliquées. Par exemple, si les spécialistes estiment que l’eau provenant des cuisines est trop usée, le système pourrait récupérer uniquement l’eau des douches.
Ce système de recyclage peut être adopté par les entreprises immobilières telles que AADL, LSP, OPGI, etc. Il peut également être appliqué individuellement par des particuliers qui souhaitent contribuer à la rationalisation de l’eau du robinet.
- Conclusions et recommandations
Dans cet article, nous avons abordé un sujet d’actualité qui attire l’attention de tous les acteurs politiques et économiques : la transition énergétique en Algérie. Ce sujet est vaste et ne se limite pas seulement au changement des sources conventionnelles vers les sources vertes et renouvelables, mais touche plusieurs autres domaines directement ou indirectement. Parmi les pistes menant à la transition énergétique, la conservation et la rationalisation de l’énergie électrique incluent l’optimisation de l’énergie de manière directe ou indirecte.
Le coût de production du mètre cube d’eau en Algérie varie entre 60 et 80 DA [4], y compris le coût du revient d’électricité, notamment pour le dessalement de l’eau de mer où le coût de production comprend la consommation de 2,5 à 3 kWh par m³ avec la technologie d’osmose inverse. D’après ces chiffres, on voit que le secteur des ressources en eau repose largement sur l’énergie électrique. Par conséquent, tout gaspillage d’eau conduit à un gaspillage d’électricité.
Afin de préserver nos ressources en eau, nous avons proposé un système permettant d’optimiser les ressources en eau en récupérant les rejets d’eau légèrement usée et en les réutilisant pour les chasses d’eau. Ce système vise à stopper le gaspillage de l’eau du robinet pour des usages non essentiels.
À cet effet, il est essentiel de conserver les ressources en eau et de les exploiter de manière rationnelle, car cette ressource est vitale et indispensable, et son coût de production est élevé. Adopter ce comportement permet également de conserver d’autres formes d’énergie, y compris l’électricité.
Dans le prochain article, nous aborderons un autre sujet concernant la transition énergétique afin de continuer à accélérer cette transition dans les meilleurs délais.
Références :
[1] Bilan énergétique national 2021, Ministère de l’Énergie et de mines
[2] Transition Energétique en Algérie « Leçons, Etat des Lieux et Perspectives pour un Développement Accéléré des Energies Renouvelables », Edition 2020.
[3] Tewfik Hasni, Redouane Malek et Nazim Zouioueche, « L’ALGÉRIE 100 % ÉNERGIES RENOUVELABLES », Recommandations pour une stratégie nationale de transition énergétique, The Friedrich Ebert Foundation, Janvier 2021.
[4] Ferrah Rachid, Farhi Karima, « La Tarification Actuelle de l’Eau Potable Appliquée en Algérie et son efficacité », Revue d’Economie et de Statistique Appliquée (ASJP), 2017.
Source : https://www.energymagazinedz.com/?p=3977