La Chine a déclaré vendredi qu’elle exigerait des permis d’exportation pour certains produits à base de graphite afin de protéger la sécurité nationale. Il s’agit là de la dernière mesure prise par la Chine pour contrôler l’approvisionnement en minerais essentiels.
La Chine est le 1er producteur et exportateur mondial de graphite, un matériau utilisé dans presque toutes les batteries de véhicules électriques.
Cette exigence, qui fait suite à la remise en cause de sa position dominante sur le marché mondial de la fabrication, fait suite à l’annonce, en juillet, de restrictions similaires à l’exportation de produits à base de gallium et de germanium utilisés dans les puces informatiques et d’autres composants.
Largement considérées comme des mesures de rétorsion à la suite des restrictions imposées par les États-Unis sur les ventes de technologies à la Chine, les restrictions sur le graphite ont renforcé l’inquiétude des pays occidentaux, qui craignent que la Chine ne limite les exportations d’autres matériaux, notamment les terres rares, dont elle domine la production.
Tom Kavanagh, responsable des métaux pour batteries chez Argus, a déclaré que d’autres minéraux essentiels que la Chine domine comprennent des formes de cobalt raffiné, de nickel et de manganèse utilisés dans les batteries des véhicules électriques. « Il est concevable qu’elle utilise cela à son avantage alors que le reste du monde tente d’augmenter sa production de batteries », a-t-il déclaré.
En 2010, la Chine a restreint les exportations de terres rares vers le Japon à la suite d’un différend territorial, ce qui a fait monter les prix en flèche et a poussé le Japon à chercher d’autres sources d’approvisionnement. Pékin a déclaré que ces restrictions étaient motivées par des « préoccupations environnementales ».
Voici quelques petits éclaircissements sur les terres rares, sur la domination de la Chine dans ce secteur et sur les mesures prises par les pays pour réduire leur dépendance à l’égard de la production chinoise.
QUE SONT LES TERRES RARES ET COMMENT SONT-ELLES UTILISÉES ?
Les terres rares sont un groupe de 17 éléments utilisés dans des produits allant des lasers et équipements militaires aux aimants que l’on trouve dans les véhicules électriques, les éoliennes et les produits électroniques grand public tels que les smartphone, les satellites ou les GPS.
QUELLE EST LA PLACE DE LA CHINE DANS LA CHAÎNE D’APPROVISIONNEMENT EN TERRES RARES ?
L’exploitation minière : La Chine représentait 70 % de la production minière mondiale de terres rares en 2022, suivie par les États-Unis, l’Australie, le Myanmar et la Thaïlande, selon les données de l’United States Geological Survey (USGS).
Traitement : La Chine abrite au moins 85 %de la capacité mondiale de transformation des minerais de terres rares en matériaux utilisables par les fabricants, selon le cabinet de recherche AdamasIntelligence en 2019.
Exportations : Les exportations chinoises de terres rares ont diminué en septembre par rapport au mois précédent, mais elles ont augmenté de 6,6% au cours des neuf premiers mois de l’année pour atteindre 40 371,8 tonnes métriques, ont montré les données des douanes chinoises.
La Chine a exporté 48 728 tonnes de terres rares en 2022, soit une baisse de 0,4 % en glissement annuel.
Les États-Unis importent la plupart de leurs terres rares de Chine, mais cette dépendance s’est réduite à 74 % entre 2018 et 2021, contre 80 % entre 2014 et 2017.
QUELS SONT LES PAYS QUI POSSÈDENT LE PLUS DE RÉSERVES DE TERRES RARES ?
Selon les données de l’USGS, les réserves de la Chine sont estimées à 44 millions de tonnes d’équivalent d’oxyde de terres rares (ROE), soit 34 % du total mondial.
Le Viêt Nam, la Russie et le Brésil disposeraient chacun d’un peu plus de 20 millions de tonnes, tandis que l’Inde en aurait 6,9 millions, l’Australie 4,2 millions et les États-Unis 2,3 millions.
QUE S’EST-IL PASSÉ EN 2010 ?
En 2010, la Chine a suspendu ses exportations de terres rares vers le Japon lors d’un conflit portant sur des îles contestées. Pékin a ensuite réduit les exportations mondiales de terres rares, expliquant qu’elle essayait de « réduire la pollution et de préserver les ressources ».
Le Japon, l’Union européenne et les États-Unis ont contesté avec succès l’action de la Chine devant l’OMC (L’Organisation Mondiale du Commerce).
Cet épisode a conduit le Japon, qui dépendait de la Chine pour la quasi-totalité de ses terres rares, à trouver d’autres fournisseurs pour réduire sa dépendance à l’égard de la Chine. Il a investi dans le producteur australien Lynas et a réduit la part de ses importations de terres rares en provenance de Chine à 38 % en 2018.
POURQUOI EST-IL DIFFICILE POUR LES AUTRES PAYS D’AUGMENTER LEUR PRODUCTION ?
Les terres rares sont relativement abondantes, mais elles sont présentes en faibles concentrations et sont généralement mélangées entre elles ou avec des éléments radioactifs tels que l’uranium et le thorium. Les propriétés chimiques des terres rares les rendent difficiles à séparer des matériaux environnants, et leur traitement génère énormément de déchets toxiques.
Des normes environnementales laxistes ont permis à la Chine d’asseoir sa domination dans le domaine des terres rares au cours des dernières décennies, alors que les producteurs occidentaux quittaient le secteur, un secteur qui paradoxalement est primordial au vu de la transition énergétique étant donné que pour transiter vers les énergies renouvelables il faudrait détenir énormément d’élément de terre rare (Pour la production des panneaux photovoltaïque, les batteries de véhicules électriques, les éoliennes et autres produits permettant de se passer des énergies fossiles)
QUE FONT LES AUTRES PAYS POUR RÉDUIRE LEUR DÉPENDANCE À L’ÉGARD DE LA CHINE ?
Les pays occidentaux ont intensifié leur soutien pour stimuler la production nationale de minéraux essentiels, y compris les terres rares. L’Australie, le Canada, l’Union européenne et les États-Unis ont mis en place des politiques et des mesures de soutien pour leurs secteurs des minéraux essentiels.
La société américaine MP Materials exploite des oxydes de terresrares dans la mine de Mountain Pass en Californie et en expédie une partie en Chine pour qu’ils soient transformés en néodyme et en d’autres métaux de terres rares. MP a annoncé en août qu’elle avait lancé une usine de séparation aux États-Unis et qu’elle raffinait de petites quantités en Californie, mais n’a pas fourni de détails quant aux volumes.
Le fabricant de véhicules électriques Tesla renonce aux terres rares dans ses futurs modèles afin d’atténuer les risques liés à l’environnement et à l’approvisionnement, alors que l’industrie des terres rares peine à répondre à la demande.
QUOTA CHINOIS
La Chine a augmenté son quota d’extraction de terres rares pour cette année, atteignant le niveau record de 240 000 tonnes, comme l’ont montré les données du gouvernement le mois dernier.
Le système de quotas, généralement émis en deux lots par an, a été mis en place en réponse aux problèmes de longue date de la Chine en matière d’exploitation minière illégale.
Le quota de production minière pour l’année 2023, y compris les 120 000tonnesémises en mars, représente une augmentation de 14 % par rapport à 2022.
Source : https://www.energymagazinedz.com/?p=3436
