Messaoudi Fakhreddine
Au début du mois de Juillet, le chancelier allemand « Olaf Scholz » avait fixé l’objectif de remplir à 95% les réservoirs de gaz avant l’hiver, un objectif « ambitieux » avait déclaré l’assemblée fédérale allemande. A priori, cet objectif ne sera pas atteint selon le chef du régulateur allemand de l’énergie « Klaus Müller ». Il faut rappeler que la demande d’énergie primaire en Allemagne dépend à 30% de ses importations russes, à raison de :
- 32% à partir du pétrole, dont 11% d’origine russe.
- 27% à partir du gaz naturel, dont 15% d’origine russe.
- 9% à partir du charbon, dont 4% d’origine russe.
- 16% à partir des renouvelables.
- 9% à partir de lignite.
- 6% à partir du nucléaire.
- 1% à partir d’autres ressources.
Cette dépendance est particulièrement ressentie dans le secteur de l’industrie pétrochimique et chimique qui consomme pratiquement la majeure partie de sa consommation gazière dont 43 milliards de M3 ont été importés de Russie en 2020.
L’Allemagne s’est engagée dans une course contre la montre depuis le mois de juin, ayant comme objectif de remplir à 95% ses réservoirs de gaz mais en vain, cet objectif devra être abandonné, et pour cause, Berlin fait face à une baisse drastique des livraisons de gaz russe, dont elle reste largement dépendante, malgré les efforts de diversification de ses approvisionnements.
Le but principal du pays était de remplir ses stocks à hauteur de 95% en gaz avant le 1er Novembre et ce pour faire face à l’hiver
« Klaus Müller » le chef du régulateur allemand de l’énergie a déclaré « Dans tous nos scénarios, nous ne parviendrons pas à [l]’atteindre » en référence à l’objectif des 95%, en ajoutant « Nous n’y parviendrons pas car certains sites de stockage sont partis d’un niveau de remplissage très bas ».
Il faut savoir qu’il y avait aussi, derrière l’objectif maximum des 95%, un objectif intermédiaire de 85% que « Klaus Müller » définit comme « pas impossible, mais très ambitieux ».
La principale raison de cet échec est le fait que la Russie a diminué, le mois dernier, unilatéralement les flux de gaz passant par le gazoduc « NordStream 1 » à 20% seulement de sa capacité. Il s’agit d’une directive demandée par « Vladimir Poutine », ce dernier utilise « l’arme énergétique » comme moyen de défense en représailles aux lourdes sanctions imposées par les occidentaux.
Et dans ce cas de figure la Russie tente de gagner plus de temps en livrant au compte goûte le gaz vers l’Allemagne car cette dernière pourrait avoir plus de temps à trouver une alternative au gaz russe si ses stocks sont remplis à 100%. D’ailleurs à ce propos « Klaus Müller » a souligné que si les réservoirs sont remplis à 95%l’Allemagne pourrait tenir environ 2 mois et demi en cas de rupture totale des livraisons russe.
Parallèlement, l’Allemagne se fixe un autre objectif :
Sachant que l’objectif 95% ne sera pas atteint, l’Allemagne tente de [réduire de 15% à 20%]« Si nous n’atteignons pas [cet] objectif, il y a un risque sérieux que nous manquions de gaz » mettait en garde le chef de régulation allemande de l’énergie « Klaus Müller » dans le magazine « Financial Times » dimanche dernier.
Il faut savoir que la demande en gaz a chuté d’environ 6,5% par rapport à l’année dernière alors même que la Russie a diminué de près de 80% des livraisons.
Par ailleurs l’Allemagne tente par tous les moyens de réduire sa consommation ainsi que sa demande d’approvisionnement du gaz russe. En Juillet dernier le gouvernement allemand a présenté un plan de sécurité énergétique comprenant des mesures d’économie de gaz obligatoires pour les entreprises. « Nous devons économiser beaucoup de gaz au moins une autre année. Pour le dire clairement : il y aura au moins deux hivers stressants » a déclaré « Klaus Müller ».
Dans cette conjoncture, un texte adopté le 26 Juillet par l’Union Européenne entrera en vigueur la semaine prochaine, et prévoit que chaque pays fasse « tout son possible » pour réduire, entre août 2022 et mars 2023, sa consommation de gaz d’au moins 15% par rapport à la moyenne des cinq dernière années, afin d’envoyer son gaz vers les pays les plus en difficulté comme l’Allemagne, qui va d’ailleurs recevoir une partie des stocks de gaz de la France, une grande première.
L’Allemagne prévoit d’autres plans :
Pour pallier à une future crise énergétique, l’Allemagne a dû revoir quelques mesures prises il y a des années, parmi elles, la réactivation de ses centrales àcharbon mais pas seulement. Depuis 2011 l’Allemagne a entrepris de réduire progressivement son parcnucléaire avec comme objectif « 0 centrale nucléaire ». Cette mesure prise par « Angela Merkel » est remise en cause aujourd’hui et le pays songe très sérieusement à prolonger ses réacteurs nucléaires pour faire face à la crise énergétique actuelle.
Outre ces mesures, il y a aussi celle qui a déjà été lancée dans l’urgence pour la construction de deux terminaux flottantsde « GNL » (Gaz Naturel Liquéfié) acheminé par navires des quatre coins du monde. Dernièrement l’Allemagne a aussi plaidé en faveur d’un projet de construction de gazoduc reliant la péninsule ibérique à l’Europe Centrale.
Malgré tous ces efforts, L’Allemagne fera face à une pénurie dans certaines régions, et il sera extrêmement difficile, et peu probable, de se passer du gaz russe aussi rapidement, et dans de telles circonstances. Selon le cabinet international « Wood Mackenzie », si la Russie venait à stopper totalement les livraisons via le gazoduc ’’Nord Stream 1’’ « l’Europe manquerait de gaz l’hiver prochain », et un rationnement serait même « inévitable » quels que soient les efforts en matière de diversification d’approvisionnement et de remplissage des stocks.
Source : https://www.energymagazinedz.com/?p=1694