Le marché pétrolier et gazier : des hauts et des bas mais toujours dans l’incertitude

Rédaction (A.M)
2022-05-15T10:00:02+02:00
Hydrocarbures
Rédaction (A.M)16 mars 2022
Le marché pétrolier et gazier : des hauts et des bas mais toujours dans l’incertitude

Après quelques annonces et déclarations alarmistes aussi bien à l’Est qu’à l’ouest qui ont fait grimper le baril au-delà de 130$, mais sans atteindre les 150$ annoncés par certains analystes. Les craintes d’une hausse importante suite à la décision des USA d’arrêter les importations de brut et produits pétroliers russes n’ont pas non plus duré longtemps.

Le voilà qui revient autour de 100$, suite à la rencontre en Turquie des premiers ministres russe et Ukrainien, et au constat qu’une confrontation générale n’est pas envisagée pour le moment meme si cette rencontre n’a donné lieu à aucun résultat positif. Les signaux positifs d’un éventuel accord sur le nucléaire Iranien ont contribué aussi à apaiser le marché pétrolier.

Pendant ce temps les pays de l’UE se sont réunis pendant deux jours pour aboutir à une décision d’accroissement des sanctions économiques sur la Russie et une autre destinée à réduire de deux tiers leurs importations de gaz et de pétrole russes à court terme (2023) et moyen terme (totalement). Comment y arriver en si peu de temps alors que cette dépendance est de 40% pour le gaz naturel, 27% pour le pétrole et 46% pour le charbon ? Ils savent parfaitement que cela va être impossible au moins pour le court terme parceque :

  • D’une part toutes les capacités de productions mondiales sont déjà engagées dans des contrats, et ce d’autant plus que la demande sur le marché asiatique n’a montré pour le moment aucun fléchissement. La Chine se permet même d’interdire l’exportation de carburants.
  • D’autre part et meme si le conflit Russie-Ukraine se ralentit ou entre dans une période de négociations sérieuses, cette dernière risque de durer des mois sinon des années, avec des incertitudes géopolitiques qui maintiendront le baril de pétrole à un niveau moyen autour 100$, qui n’arrange aucune économie occidentale de part sa volatilité. On l’a déjà remarqué bien avant ce conflit avec les pressions des USA sur l’OPEC+ pour qu’ils augmentent leur production alors que le baril n’avait meme pas atteint les 70$.
  • Par contre le casse-tête des pays européens est ailleurs, et concerne surtout le gaz naturel dont le prix ne semble pas redescendre de sitôt, sans compter l’impact sur le prix de l’électricité qui en dépend dans une large part. Même si l’AIE estime que l’Europe peut réduire ses importations de gaz russe de 63 Mds M3 en les important à court terme sous forme de GNL d’autres sources, il restera au moins 92 Mds M3 dont il sera difficile ou même impossible de s’en passer pour le moment.

Entretemps les USA s’auto suffisent en gaz naturel et en exportent meme de grosses quantités vers l’Europe et l’Asie. Mais son prix est aussi monté en interne sur le continent à un niveau jamais atteint depuis plusieurs années, soit 5$/MMBtu, tandis que le prix des carburants varie autour de 5$ le galon. Il n’est difficilement maintenu qu’à coups de tirages sur les réserves stratégiques dont le niveau est aussi au plus bas depuis 2019, en dessous de 400 millions, soit presque 100 millions de barils de moins par rapport à la meme période 2021.

On constate cependant que la production pétrolière des USA est progressivement revenue en ce début d’année 2022 à un niveau de 11,6 millions de barils par jour, équivalente à celle du début 2019. A ce niveau et meme si la production de pétrole de schiste continue à augmenter, les importations de Russie ne pourront être compensées qu’avec des appoints à négocier avec d’autres producteurs, y compris en espérant une éventuelle reprise des exportations iraniennes en cas de finalisation de l’accord sur le nucléaire. La production iranienne est effectivement en mesure de passer de 2,4 millions de barils par jour actuellement 4 millions, mais dans un délai de plusieurs mois, sinon une année, avec environ 1 million de barils par jour, à cause des investissements de rénovation des capacités de production.

La majorité des autres sources de production « additives » de pétrole sont toutes situées :

  • D’une part et en plus de l’Iran, au niveau du Moyen Orient entre l’Arabie Saoudite, l’Irak et les Emirats Arabes Unis, tous membres de l’OPEP+. Seuls les Emirats Arabes Unis semblent avoir un penchant pour une augmentation de la production, mais est-ce dans l’intérêt de la cohésion actuelle au sein de l’OPEP+ ?
  • D’autre part au niveau du Venezuela, du Nigéria, de la Libye, et quelques pays d’Afrique, dont la production est sous embargo US, ou en chute pour de nombreuses raisons techniques ou intérieures.

Il faut enfin compter avec la volonté des pays de l’Europe qui ont décidé de réduire leurs importations de Russie des 2/3 d’ici 2023 et la totalité d’ici 2027. Tous ces paramètres laissent prévoir une rude compétition sur le marché pétrolier au grand bonheur des producteurs, mais aussi un dilemme pour l’OPEP+ dont fait partie la Russie, par rapport à sa stratégie de contrôle raisonnable de la production et du marché.

Au-delà des profondes mutations géopolitiques qui vont affecter le monde et son économie dans les années à venir, le prix du baril de pétrole va demeurer volatile mais très probablement aux environs de 100$ sur les mois à venir, à moins d’une confrontation générale qui aura des conséquences catastrophiques, y compris avec un impact négatif sur la demande.

Le prix du gaz naturel quant à lui, demeurera élevé et gagnera à court et moyen terme sur le pétrole. Après un bond de 900% l’année dernière avec un prix qui a atteint les 101 Euros/MMBtu, il a de nouveau chuté à 34 Euros/MMBtu parceque le gaz russe continue à être livré en Mars à un niveau supérieur à celui de Janvier-Février 2022. A moins de sanctions plus importantes vis-à-vis de la Russie et pouvant impacter ces livraisons, ou de généralisation du conflit, le prix va demeurer au-delà de ce niveau.

Les politiques de transition énergétique vers des sources d’énergies propres et renouvelables seront certes renforcées, mais elles vont faire face à des modifications de stratégies dans lesquelles le mix énergétique verra un retour momentané sur le charbon et de longue durée sur le nucléaire. Dans ce futur mix énergétique, le gaz sera plus que nécessaire.

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